La méditation ne consiste pas à imposer à notre esprit un état d’être quelconque car plus vous tenterez de le contrôler ou de le “vider” plus vous vous apercevrez que l’état inverse se produit.

Nous générons un flux continuel de pensées, il serait question en moyenne de 60 000 pensées par jour !! Que ce chiffre soit avéré ou non, il n’en reste pas moins qu’avec un peu d’observation, il est aisé de nous rendre compte que nous n’arrêtons jamais de penser.

Combien d’entre nous sont capables de rester naturellement conscients de ce qu’ils sont en train de faire? En prenant notre douche le matin, en conduisant, en marchant tout simplement … Sans travail conscient afin de nous recentrer sur le présent, nous passons notre vie déconnecter de l’instant présent.

Je vous propose aujourd’hui de découvrir la méditation Shamatha qui cultive la “tranquilité de l’esprit”.

Par une pratique quotidienne, votre flux de pensée va progressivement et naturellement diminuer, se calmer, vous ferez naître des moments de “rupture”, vous serez capable d’agir en pleine conscience et non en proie à votre mode automatique.

Il va s’agir de vous asseoir et de rester tranquille. Facile me direz-vous… En êtes-vous sûr?

Mais avant de partager cette pratique avec vous, je vous propose de découvrir le Sentier de Shamatha et les diverses phases que l’apprenti méditant parcoure à travers un extrait du livre de Kalou Rinpoché, la Voie du Bouddha.

Le sentier de Shamatha – La voie du Bouddha – Kalou Rinpoché

L’illustration de ci-dessus reproduit une xylographie tibétaine qui présente les neuf étapes du cheminement de shamatha en les illustrant par neuf scènes. Il y a deux personnages : l’homme, qui est le sujet méditant, l’observateur, et l’éléphant, son esprit. Le méditant manie les deux outils dont il dispose pour développer shamatha : l’attention et le rappel. La hachette, incisive, représente l’acuité de l’attention vigilante et la corde à crochet est le souvenir de la pratique, le rappel. Comme de nombreuses distractions interrompent l’état d’attention vigilante, le méditant doit y revenir par des rappels constamment répétés. La vigilance est l’acuité de base de la pratique et le rappel l’élément qui en assure la continuité.

L’état de shamatha a deux principaux obstacles : d’une part l’agitation créée par les fixations sur les pensées et les émotions, et d’autre part la torpeur, l’opacité mentale. La torpeur est représentée par la noirceur de l’éléphant et l’agitation par celle du singe. Le feu qui décroît au fil des étapes exprime le niveau énergétique de la méditation : au fur et à mesure qu’elle progresse, la pratique exige de moins en moins d’efforts. Les six virages du chemin déli­mitent six paliers de la progression, dominés successivement par six forces de la pratique qui sont : l’écoute des instructions, leur assimilation, leur souvenir, la vigilance, la persévérance et la parfaite habitude. En bordure du chemin sont placés différents objets : plat de nourriture, conque, petite cymbale et miroir représentant les objets sensoriels : saveurs, odeurs, sons, et formes visuelles, qui distraient du chemin de shamatha si le méditant les saisit.

Station I

Au bas de la reproduction, à la première station, la distance séparant le méditant et son esprit est grande. L’éléphant de l’esprit est mené par le singe de l’agitation. Le feu est important, c’est-à-dire que la méditation demande beaucoup d’énergie ; les obstacles sont à leur maximum : tout est noir.

Station II

À la deuxième station, le méditant grâce à son attention se rapproche de l’éléphant ; le singe mène toujours l’esprit mais le rythme s’est ralenti. L’opacité et l’agitation décroissant, du blanc filtre dans la noirceur de l’éléphant et du singe.

Station III

À la troisième station, le méditant ne court plus vraiment après son esprit ; ils sont maintenant face à face. Le singe est toujours en avant mais il n’entraîne plus l’éléphant. Un contact suivi entre le méditant et l’esprit s’est établi avec la corde du rappel. Une forme de torpeur subtile, passée jusqu’alors inaperçue, apparaît ; c’est le petit lapin. La noirceur de l’opacité et de l’agitation décroissent.

Station IV

À la quatrième station, l’évolution se précise, le méditant se rapproche encore de l’éléphant. La blancheur du singe, de l’éléphant et du lapin progresse. La scène est plus calme.

Station V

À la cinquième station, la situation se renverse. Le méditant guide maintenant l’éléphant de l’esprit avec une attention et un rappel continus. Le singe ne conduit plus, mais le lapin est toujours là. La scène est encore plus claire.

Dans l’arbre, un singe blanc cueille des fruits blancs : il représente l’activité de l’esprit s’engageant dans des actes positifs. Bien que de telles actions doivent habituellement être cultivées, ce sont des distractions pendant la pratique de shamatha ; c’est pourquoi l’arbre est noir et à l’écart du chemin.

Station VI

À la sixième station, les progrès se précisent ; le méditant conduit ; le rappel de la méditation est constant sans que l’attention n’ait plus besoin d’être dirigée vers l’esprit. Le lapin est parti et la situation se clarifie de plus en plus.

Station VII

À la septième station, la scène est devenue très paisible. La marche n’a plus à être dirigée. La situation est devenue presque complètement transparente ; quelques taches noires signalent encore des points délicats.

Station VIII

À la huitième station, l’éléphant marche docilement avec le méditant. Il n’y a pratiquement plus de noir et la flamme de l’effort a disparu. La méditation est devenue naturelle et continue.

Station IX

À la neuvième station, l’esprit et le méditant sont tous deux au repos complet. Ils sont comme de vieux compagnons habitués à rester tranquilles ensemble. Les obstacles ont disparu, shamatha est parfait.
Les tableaux suivants, portés par le faisceau émanant du cœur du méditant, représentent l’évolution de la pratique au sein de cet état de shamatha. La réalisation de shamatha est caractérisée par des expériences d’allégresse et de ravissement, illustrées par le méditant volant ou transporté à dos d’éléphant.
Le dernier tableau se réfère à la pratique conjointe de shamatha et de vipashyana. La démarche se renverse. Esprit et méditant sont ensemble, l’un chevauchant l’autre. Le feu révèle une nouvelle énergie qui apparaît : l’intelligence immédiate, représentée par l’épée flamboyante de la connaissance transcendante, tranche les deux faisceaux.

A présent, place à la pratique 🙂

Choisissez une pièce où vous ne serez pas dérangé et suffisamment chaude car vous serez amené à rester assis sans bouger. Portez des vêtements amples, de préférence en coton ou fibres naturelles. Ôtez vos chaussures et laissez-les à l’extérieur de la pièce. Asseyez-vous sur un coussin de méditation lui-même posé sur un tapis de yoga ou un tapis épais, afin de ne pas abîmer vos chevilles. Si vous n’avez pas de coussin de méditation, prenez une serviette de plage que vous aurez pris soin de plier afin d’avoir votre bassin plus haut que vos pieds. Si besoin, munissez-vous d’un plaid ou un châle et enveloppez-vous dedans. Il est important de ne lutter ni contre le chaud, ni contre le froid.

– Asseyez-vous sur votre coussin (sur l’avant et presque au bord afin de maintenir une bascule au niveau du dos), jambes en tailleur, dos droit. Ne vous adossez pas à un mur, ne vous allongez pas. Grandissez-vous en tirant votre tête vers le haut afin de maintenir votre dos bien droit. Ne vous rigidifiez pas. Sentez l’axe qui part de votre périnée et s’étend jusqu’à votre fontanelle. Si vous avez du mal avec la position en tailleur, asseyez-vous sur une chaise, dos droit, ne vous adossez pas.

– Les yeux mi-clos, le regard posé sur le sol (80cm à 1m devant vous), sans intention particulière, concentrez-vous sur votre respiration. Laissez le souffle aller sans chercher à le contrôler. Prenez conscience de l’air qui entre par vos narines… descend dans votre gorge… dans vos poumons, puis expirez… sentez le flux d’air remonter votre gorge puis sortir par vos narines. Soyez attentif aux sensations… à la chaleur ou à la froideur de l’air… à vos poumons qui se gonflent… puis se vident… à la paix qui vous envahit…

– Des pensées vont venir… des émotions y seront peut-être associées. Observez-les, sans jugement puis naturellement, recentrez-vous sur votre souffle. Que les pensées soient agréables ou non, revenez au souffle, sans jugement sur ce qui est venu, laissez aller…

Consacrez au moins 20 min à cette pratique quotidiennement

Certains jours, vous sentirez votre flux de pensée faible ; d’autres jours, vous serez bombardé de pensées. Cela ne voudra pas dire que vous n’y arrivez pas aujourd’hui. Il ne s’agit pas de viser le zéro pensée car vous seriez dans le contrôle, ce qui ne vous conduira jamais au calme mental.

L’objectif de cet exercice est :

  • d’observer votre flux de pensée et de vous recentrer dans l’instant présent
  • de comprendre que vous n’êtes pas vos pensées et qu’il existe un état mental, calme et serein au-delà du flux continu de vos pensées.

En pratiquant quotidiennement (la continuité est la clé), votre flux mental va petit à petit se calmer. Vous ne laisserez plus vos pensées vous piloter automatiquement.

A noter : vous pouvez pratiquer ce rappel à soi dès que vous sentez que votre mental tourne en rond, que vous êtes happé par vos pensées, que vous êtes en proie au doute, à l’anxiété, à la peur, à la colère… que vous perdez de vue la réalité de l’ici-et-maintenant, que vous êtes en RÉACTION (pilote automatique de l’ego) et non DANS L’ACTION (j’agis en pleine conscience).

Bonne pratique !